Mercredi, 13 novembre 2024

Chroniques

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Nicole : son jeûne et son colocataire

Le 31 octobre 2024 — Modifié à 09 h 00 min le 31 octobre 2024
Par Roger Lemay

On le sait tous, la population du Saguenay-Lac-St-Jean, formée de quelques 284 000 individus, est vieillissante. Les statistiques sont un peu faussées ces années-ci en raison de la rentrée massive d’immigrants, temporaires ou non, (4000 en 2023), qui heureusement pour nous, viennent combler nos besoins en main d’œuvre et contribuent à faire rouler notre économie. Mais dans les faits, il y a plus de décès que de naissances chez nous. Bref, la tranche d’âge des 65 ans et plus s’élargit d’année en année. Or il s’agit de la tranche d’âge la plus vulnérable, la plus touchée par l’inflation galopante, toujours en croissance malgré les efforts de la Banque du Canada.

Celle que nous appellerons Nicole a 74 ans. Elle a travaillé dans un commerce de détail de Chicoutimi toute sa vie adulte. À petit salaire donc. Et qui dit petits revenus au travail dit petite pension à la retraite. À peine 60 000 dollars de REER, pour le reste elle compte sur les rentes gouvernementales. Victime d’une éviction de son logement pour cause de rénovations, elle n’avait même plus les moyens d’y retourner après les rénos puisque le prix mensuel avait presque doublé.

« J’ai su trop tard que j’avais le droit de rester dans mon logement à cause de mon âge. Alors il m’a fallu déménager chez mon frère. Nous séparons les dépenses, mais ce n’est pas assez, la nourriture est devenue très chère… »                            

Les prix des aliments ont en effet augmenté plus rapidement que l'indice général des prix à la consommation, qui s'est accru de 6 % l’an dernier selon Statistiques Canada. Les gens ressentent le choc de la hausse de 10,3 % sur 12 mois des prix des denrées, toujours selon Statistiques Canada.

Pour Nicole et son frère, devenu par la force des choses son colocataire, se serrer la ceinture est même parfois synonyme de jeûne. « Je ne dis pas que je le fais souvent, mais il m’arrive de sauter des repas. J’économise, mais en même temps on dit que c’est bon pour la santé (rires). Disons aussi que j’ai quelques trucs pour l’épicerie. J’achète du pain moins cher, j’attends qu’il soit à 30% de rabais. Il n’est peut-être pas du jour mais quand même bon. 50% pour les desserts. Et puis je cuisine moins de viande et plus de fèves. »   

Exit aussi la voiture. En occupant le même appartement, Nicole a pu vendre son auto et utilise celle de son frère à l’occasion.                         

Nicole n’est qu’un exemple parmi d’autres dans la région. Environ 30 % des personnes âgées vivent en dessous du seuil de pauvreté, avec un revenu moyen de 20 000 $ par an, selon Statistiques Canada. 

Je trouve simplement triste de constater l’appauvrissement de nos aînés, devenu un enjeu majeur au Québec. Triste surtout car ces personnes, devenues âgées, (comme nous le deviendrons tous un jour à moins d’une fatalité) ont consacré leur vie à bâtir notre société. Il est essentiel de leur garantir un vieillissement en dignité et en sécurité.

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