Autrefois cachée, ou du moins loin des regards, l’itinérance est désormais un phénomène bien visible à Dolbeau-Mistassini. Et il faudra s’y faire puisque la situation ne changera pas d’un coup de baguette magique.
« Le fait qu’on voit davantage l’itinérance, c’est multifactoriel. D’abord, il y a l’accessibilité au logement qui est beaucoup plus difficile. Autrefois, on arrivait à loger les gens dans des maisons de chambre. La pandémie a aussi changé la donne, car plusieurs itinérants se trouvaient un divan temporairement et cela n’était plus possible. Les choses ont changé et il faut comprendre que le phénomène va demeurer », explique Arianne Lévesque, intervenante au Centre de santé mentale L’ArrimAge.
Celle-ci fait partie d’un comité regroupant plusieurs organismes qui œuvrent auprès de personnes en situation d’itinérance. On y retrouve également Marie-Pier Fortin, infirmière clinicienne et coordonnatrice en santé mentale pour le CIUSSS à Dolbeau-Mistassini, Cassandra Daguier, intervenante chef d’équipe à la Maison du cheminement, et Kira Tremblay, coordonnatrice clinique pour Toxic Actions.
Visibilité accrue
L’itinérance est plus visible qu’autrefois, donc, et particulièrement dans les Promenades du Boulevard. Suffisamment pour que certaines personnes se sentent heurtées par le phénomène et que des questions aient été soulevées dans la population à la suite d’événements isolés.
« On comprend qu’il puisse y avoir des craintes dans la population face à cette nouvelle réalité, mais au-delà de la crainte, il faut voir l’humain qui est derrière. Ce sont des gens dans le besoin », souligne Kira Tremblay.
« Il faut faire preuve d’ouverture, renchérit Cassandra Daguier. Comme citoyen, il faut que tu te questionnes à savoir comment tu te sens quand tu vois de l’itinérance que tu ne voyais pas avant. Ça peut être confrontant, mais il va falloir faire avec de toute façon puisque le phénomène est là. »
Cette dernière rappelle en outre qu’il faut éviter de faire des liens qui peuvent apparaître faciles entre toxicomanie, santé mentale et itinérance. Ces réalités existent et peuvent être interreliées, mais ce n’est pas nécessairement le cas.
Travail de l’ombre
Ce qui est moins visible, c’est tout le travail qui se fait en arrière-plan, à l’abri des regards, afin d’offrir le meilleur encadrement possible aux personnes en situation d’itinérance. Chaque jour, des professionnels sont en contact avec elles, que ce soit à l’intérieur des Promenades du Boulevard ou via les services d’organismes locaux.
On tente de les amener vers des services qui répondent à leur besoin, mais ce sont des choix qui leur appartiennent. Une personne a beau être en situation d’itinérance, elle est encore libre de ses choix et on ne peut pas la forcer à accepter un service contre son gré.
« Il ne faut pas oublier que ce sont des personnes libres et ce sont souvent des gens qui sont loin des services, qui sont plus difficiles à aller chercher. Ça ne parait pas aux yeux de la population, mais nous on le voit qu’on fait des progrès », dit Kira Tremblay.
« Par exemple, indique Marie-Pier Fortin, on voit que le taux d’occupation à l’urgence a diminué grâce à la halte chaleur. L’urgence était souvent leur dernier recours, mais aujourd’hui ils préfèrent venir ici (la halte chaleur) et c’est moins stigmatisant. »